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Picture of Thich Nhat Hanh smiling joyfully

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Les Bouddhistes croient-ils en la réincarnation?

Publié dans #Inspiration

LES BOUDDHISTES CROIENT-ILS EN LA RÉINCARNATION ?

Enseignement donné par le Vénérable Maßtre Thich Nhat Hanh au Village des Pruniers


Dans le bouddhisme nous pouvons transcender la notion de naissance et de mort et nous utilisons le mot de remanifestation.

Je voudrais savoir combien parmi vous ont vu le film intitulĂ© " Little Buddha " ? Une enquĂȘte a permis d’établir en 1983 que 25 pour cent des EuropĂ©ens croient en la rĂ©incarnation. Huit ans plus tard, aux Etats-Unis, on a dĂ©couvert que 23 pour cent des AmĂ©ricains croient Ă  une certaine forme de rĂ©incarnation. Il y a donc beaucoup de gens qui sont prĂȘts Ă  croire ou qui sont favorables Ă  l’idĂ©e de rĂ©incarnation. Parmi ces gens il y a des catholiques, des protestants, etc. Des dirigeants chrĂ©tiens disent que les enseignements de la rĂ©incarnation ne correspondent pas Ă  ceux du christianisme. Mais comme tant de personnes y croient, ils pensent qu’il est impossible de refuser cette notion.

La notion de rĂ©incarnation est populaire pour plusieurs raisons : d’abord il semble que certains individus qui nuisent aux autres par leur comportement ne souffrent pas du tout ; c’est une forme d’injustice, il faudrait donc qu’il y ait une vie future pour que ces gens puissent en quelque sorte payer en Ă©change du mal qu’ils ont commis.

L’autre raison c’est que la durĂ©e de la vie terrestre est trop courte pour Ă  elle seule dĂ©cider de l’éternitĂ©. Nous vivons 50, 60 , 70 ans seulement et nous voudrions avoir d’autres possibilitĂ©s pour rĂ©ussir Ă  ĂȘtre en harmonie avec Dieu, pour prouver que nous sommes capables de vivre mieux.

Une autre raison c’est la peur du nĂ©ant. Si ce corps disparaissait, recommencer dans un autre corps plus sain, ce serait comme de changer de vĂȘtement. Il faut donc qu’il y ait d’autres vies pour continuer et ainsi la notion de rĂ©incarnation est trĂšs rĂ©confortante et elle prend racine en Occident.

A cause du film de Bertolucci les gens pensent de plus en plus Ă  la rĂ©incarnation. Une chose amusante est qu’en Asie on n’aime pas tellement l’idĂ©e de rĂ©incarnation parce qu’on voudrait plutĂŽt que la roue de l’existence cesse et avec elle le cycle des souffrances. Mais en Occident, il semble que l’on aime cette idĂ©e. Il y a donc une diffĂ©rence de mentalitĂ© entre l’Occident et l’Orient. C’est un fait que l’idĂ©e de rĂ©incarnation avec la notion de continuation qu’elle implique est actuellement trĂšs populaire.

Au cours du troisiĂšme siĂšcle aprĂšs J.C. un thĂ©ologien catholique du nom de Origen a enseignĂ© la prĂ©existence de l’ñme avant son entrĂ©e dans le corps. Il s’agit donc d’incarnation et non de rĂ©incarnation. Il semble que cette idĂ©e soit trĂšs proche de l’autre parce que si vous ĂȘtes incarnĂ© une fois il est possible que vous le soyez une autre fois. En 540 environ Origen a Ă©tĂ© condamnĂ© par le concile de Constantinople Ă  cause de cette idĂ©e.


La notion de rĂ©surrection est proche de celle de rĂ©incarnation. Qu’est-ce qui doit ĂȘtre ressuscitĂ© sinon le corps? Donc nous pouvons utiliser la notion de rĂ©incarnation. Lorsque le corps est restaurĂ© l’ñme entrera Ă  nouveau dans le corps. D’aprĂšs les enseignements du Jugement Dernier chacun doit retrouver son corps ressuscitĂ© et c’est bien une rĂ©incarnation. Il est difficile de dire qu’il n’y a pas de rĂ©incarnation dans le christianisme. Certains thĂ©ologiens chrĂ©tiens disent que pour inclure la notion de rĂ©incarnation il faudrait modifier de nombreux enseignements Ă  l’intĂ©rieur mĂȘme du christianisme. Nous ne sommes pas sĂ»r de cela parce que les Ă©lĂ©ments de rĂ©incarnation sont vraiment lĂ  dans les enseignements du christianisme.

Nous voulons tous savoir ce qui va arriver aprĂšs notre mort et nous nous rĂ©voltons tous contre l’idĂ©e que nous devons mourir. C’est pourquoi l’idĂ©e de rĂ©incarnation est trĂšs importante pour nous. Devons-nous continuer ou pas aprĂšs la mort ? et oĂč et quand ?

Nous savons que les humains ne peuvent pas ĂȘtre heureux s’ils ne croient pas en quelque chose. La foi est importante, mais la foi c’est quelque chose de vivant, c’est comme l’amour, la haine, le dĂ©sespoir, c’est une formation mentale. C’est une chose vivante et tout ce qui est vivant change. Votre foi c’est quelque chose de vivant qui doit changer au cours du temps, qui doit grandir comme un arbre. La foi qui Ă©tait la vĂŽtre quand vous aviez dix ans n’est plus lĂ . Que vous soyez chrĂ©tien, musulman, marxiste, bouddhiste ; la foi est quelque chose qui doit changer tout le temps : il faut accepter ce fait. L’avantage de l’étude et de la pratique du bouddhisme, c’est qu’on nous rappelle constamment que tout change y compris notre foi, la foi est une chose vivante.

Alors que vous continuez Ă  vivre, votre foi grandit. C’est la mĂȘme chose dans toutes les traditions spirituelles et nous ne devons pas craindre l’arrivĂ©e d’un changement dans notre façon de croire. En fait, lorsque les choses arrĂȘtent de se dĂ©velopper, la vie devient impossible. D’une part, nous savons que sans foi nous ne pouvons pas vivre, nous ne pouvons pas ĂȘtre heureux. D’autre part, nous savons que la foi est quelque chose qui change. Il y a donc le risque de perdre votre foi et dans ce cas vous devenez une sorte de fantĂŽme affamĂ©.

C’est pourquoi notre attitude vis-Ă -vis de la foi est trĂšs importante. Nous devons prendre soin de notre croyance, de notre foi, d’une façon trĂšs sage, de sorte que notre foi se dĂ©veloppe dans la direction qui nous apportera plus de paix et de joie.

Il y a plusieurs années vous aviez une idée à propos du Bouddha, cette idée était en rapport avec votre foi dans le bouddhisme. Maintenant aprÚs plusieurs années de pratique vos notions à propos du Bouddha ont beaucoup changé et bien sûr votre foi a aussi changé. Donc votre foi dépend de vos notions, de votre perception, de vos études, de votre pratique. Nous devons abandonner nos perceptions, nos notions, de façon à avoir une perception meilleure, une foi meilleure. Nous ne pouvons pas nous associer une seule notion à un objet unique de notre foi.

D’abord il se peut que nous croyions que la rĂ©incarnation correspond Ă  l’idĂ©e que l’ñme entre dans le corps. Nous pouvons dire que l’ñme est permanente et le corps impermanent. Lorsque nous nous dĂ©barrassons d’un corps nous pouvons entrer Ă  nouveau dans un autre corps. L’immortalitĂ© de l’ñme et l’impermanence du corps, c’est peut-ĂȘtre une premiĂšre notion de rĂ©incarnation. Il se peut que nous commencions comme cela et que nous nous appelions bouddhistes, c’est acceptĂ© pour un dĂ©butant. Mais si vous continuez Ă  ĂȘtre un bouddhiste vous devez pratiquer plus et l’idĂ©e de l’immortalitĂ© de l’ñme doit faire place Ă  une autre idĂ©e plus proche de la rĂ©alitĂ©.

Si vous Ă©tudiez les soutras, si vous pratiquez l’observation de votre esprit ; vous verrez qu’il n’y a rien de permanent dans l’ensemble des cinq skandas : le corps, les sensations, les perceptions, les formations mentales et la conscience. Tout change constamment. Il n’y a pas une seule chose qui reste identique pendant deux moments consĂ©cutifs. Vous voyez que non seulement le corps, mais aussi l’ñme est impermanente, parce que l’ñme est faite d’élĂ©ments tels que les sensations, les perceptions, les formations mentales et la conscience. En dehors de ces Ă©lĂ©ments il n’y a rien que vous puissiez appeler une Ăąme. L’idĂ©e d’immortalitĂ© de l’ñme doit ĂȘtre remplacĂ©e et votre comprĂ©hension de la rĂ©incarnation sera plus proche de la rĂ©alitĂ©.

On appelle bouddhisme populaire le bouddhisme des masses. Mais si vous continuez, vous entrez dans un autre bouddhisme : le bouddhisme profond ; et c’est un domaine que nous explorons. A cause de cette exploration nous sommes plus proches de la rĂ©alitĂ© de nous-mĂȘme et du Dharma. L’idĂ©e de rĂ©incarnation est encore lĂ  mais notre comprĂ©hension est diffĂ©rente.

RĂ©-in-carnation : "carn", c’est la chair. L’idĂ©e consiste en ce qu’il y ait une Ăąme, un corps et l’ñme pĂ©nĂštre dans le corps. Dans le bouddhisme on n’utilise pas le mot rĂ©incarnation mais le mot renaissance, parce que la notion de rĂ©incarnation implique l’existence d’une Ăąme immortelle qui entre et sort du corps et entre Ă  nouveau dans un autre corps. Il n’existe rien de tel que cette Ăąme immortelle qui sort d’un corps pour entrer dans un autre. L’utilisation du mot renaissance est perçue comme quelque chose d’inadĂ©quat parce que le mot naissance reprĂ©sente quelque chose qui n’existe pas vraiment si nous sommes capables de toucher la rĂ©alitĂ© de la non-naissance et de la non-mort.

Etre nĂ© veut dire qu’à partir de rien on devient quelque chose et que de quelque chose on devient rien lorsque l’on meurt. J’existe pendant tant d’annĂ©es et tout d’un coup je cesse d’exister. C’est la notion habituelle de mort et de naissance. Observant ce qui nous entoure nous voyons que rien ne fonctionne ainsi.


Il y a une fleur et nous pensions que c’est quelque chose qui vient de rien. Mais avant sa naissance la fleur existe sous une autre forme. Dans le bouddhisme nous pouvons transcender la notion de naissance et de mort et nous utilisons le mot de remanifestation. La naissance de la fleur c’est un jour de remanifestation. La fleur Ă©tait donc dĂ©jĂ  lĂ  sous une certaine forme mais nous n’étions pas capable de la reconnaĂźtre. Vishnapti veut dire se manifester de façon Ă  ce que les gens reconnaissent et perçoivent. L’idĂ©e de manifestation implique l’idĂ©e d’une manifestation antĂ©rieure. Cette chose est toujours lĂ . Si les conditions sont suffisantes cette chose peut Ă  nouveau se manifester. Et, lorsque nous voyons les choses se manifester, nous disons qu’elles sont nĂ©es mais en fait elles ne sont pas nĂ©es, elles se manifestent. Parce qu’ĂȘtre nĂ© c’est Ă  partir de rien. Donc il y a eu quelque chose avant qu’il y ait manifestation.

Les notions de naissance, d’existence, de venir, de paraĂźtre sont des notions que nous appliquons Ă  une chose aprĂšs qu’elle se soit manifestĂ©e. Avant la manifestation de cette fleur nous ne la voyons pas. Nous disons : la fleur n’est pas encore nĂ©e. Lorsqu’elle se manifeste nous disons : la fleur est nĂ©e, elle est arrivĂ©e. Etre nĂ©, ĂȘtre arrivĂ©, c’est s’ĂȘtre manifestĂ© et lorsque la fleur Ă  cause d’un manque de conditions nĂ©cessaires arrĂȘte de se manifester nous disons qu’elle n’est plus. Donc toutes nos notions comme la naissance, la mort, l’ĂȘtre, le non-ĂȘtre , venir, partir, toutes ces notions doivent ĂȘtre transcendĂ©es. La rĂ©alitĂ© est en dehors de ces notions. Lorsque nous Ă©tudions le bouddhisme et pratiquons le regard profond nous nous libĂ©rons de toutes ces idĂ©es. Nous avons toujours une croyance et elle est de plus en plus solide et personne ne peut nous l’enlever, parce que notre croyance n’est pas faite de notions mais de la rĂ©alitĂ©.

Au dĂ©but on peut croire Ă  la rĂ©incarnation et grĂące Ă  cette croyance vous avez l’impression d’ĂȘtre sur un chemin, mais lorsque vous commencez Ă  pratiquer votre idĂ©e sur la rĂ©incarnation change. Au dĂ©but vous avez l’idĂ©e de cette Ăąme immortelle qui entre dans un corps et qui en sort pour entrer dans un autre. Mais, comme vous observez profondĂ©ment Ă  l’intĂ©rieur et Ă  l’extĂ©rieur vous comprenez que cette notion est un peu naĂŻve. Donc vous transcendez cette notion et ainsi votre foi se dĂ©veloppe. Comme la croissance de votre foi est basĂ©e sur l’observation vĂ©ritable, vous avez toujours votre croyance et elle continue Ă  vous apporter de la joie, vous savez que mĂȘme si votre croyance change demain, vous n’aurez pas peur parce que vous approchez de plus en plus la rĂ©alitĂ©. Il n’y a aucun risque de ne plus avoir de croyance parce que vous avez dĂ©cidĂ© d’ĂȘtre un avec la rĂ©alitĂ©. Si vous dĂ©cidez de vous attacher Ă  un concept vous risquez de douter et alors, vous allez plonger dans la nuit de la non-croyance et c’est un moment trĂšs difficile dans une vie.

Au dĂ©but de votre pratique du bouddhisme vous avez une notion du Bouddha, du Dharma et de la Sangha. Vous exprimez votre dĂ©sir de prendre refuge dans le Bouddha, le Dharma et la Sangha. Votre croyance dans le Bouddha, le Dharma et la Sangha est basĂ©e sur votre comprĂ©hension des trois joyaux Ă  ce moment. Mais alors que vous pratiquez, vos notions de Bouddha, de Dharma et de Sangha ont changĂ© et c’est une bonne chose. Parce que si dix annĂ©es passent sans que votre croyance Ă©volue vous risquez de vous rĂ©veiller et de ne plus croire en ce que vous croyiez. Il semble que cette notion n’est plus valable et vous ĂȘtes plongĂ© dans l’obscuritĂ© de la non-croyance. Nous ne devons pas accepter une chose comme la vĂ©ritĂ© et la garder comme une notion en nous. Nous devons observer cette chose chaque jour nous devons toucher la rĂ©alitĂ© de notre vie spirituelle chaque jour et c’est une façon trĂšs sĂ»re de nous occuper de notre croyance.

Au Village des Pruniers vous avez appris que le Bouddha est une personne Ă©veillĂ©e qui a beaucoup de comprĂ©hension et de compassion. Vous apprenez que vous aussi vous avez l’éveil et que vous pouvez cultiver la comprĂ©hension et la compassion. On vous donne des instructions pour y arriver. On vous explique qu’il y a une semence de Pleine Conscience en vous. Si vous voulez arroser cette semence chaque jour, si vous pratiquez le toucher de cette semence chaque jour, cette semence va se dĂ©velopper et vous procurer l’énergie de la compassion, de la comprĂ©hension, de l’amour, de la joie. En pratiquant vous remarquez que l’enseignement est vrai parce que votre comprĂ©hension, votre tolĂ©rance et votre compassion se dĂ©veloppent chaque jour. A cause de cela (l’expĂ©rience directe de la pratique) vous croyez dans la pratique de la Pleine Conscience et personne ne peut retirer cette croyance de vous. On vous dit que l’essence de Bouddha c’est I Ă©nergie de la Pleine Conscience en lui ou en elle. On vous dit que vous avez cette semence de Pleine Conscience et que vous avez la capacitĂ© d’un Bodhisattva. Et comme l’énergie de la Pleine Conscience c’est l’essence d’un Bouddha ou d’un Bodhisattva, vous savez que le Bouddha et le Bodhisattva sont lĂ . Parce que chaque fois que vous ĂȘtes soutenu, que vous ĂȘtes motivĂ©, que vous ĂȘtes Ă©veillĂ© par l’énergie de la Pleine Conscience vous vous sentez bien, joyeux, vivant vous sentez la force en vous et donc l’énergie de la Pleine Conscience est l’objet de votre croyance. Si vous croyez en la Pleine Conscience en vous-mĂȘme ; votre croyance dans le Bouddha sera identique Ă  cela. Donc vous n’avez pas besoin d’aller en Inde pour rencontrer le Bouddha. Vous n’avez pas besoin de retourner 2600 ans en arriĂšre pour rencontrer le Bouddha. Vous savez que vous pouvez rencontrer le Bouddha dans l’ici et le maintenant chaque fois et oĂč vous -le voulez. L’autre jour, j’ai dit que si j’entends que le Bouddha est maintenant dans l’état de Bihar en Inde au pied de la montagne Gridakuta, que si l’on veut le rencontrer et pratiquer la mĂ©ditation marchĂ©e il faut acheter un ticket d’avion. Je ne suis pas tentĂ© de faire cela parce que je sais que je peux ĂȘtre avec le Bouddha. Je peux le faire tout de suite, je n’ai pas besoin d’aller oĂč que ce soit pour le faire. Et nous tous pouvons le faire parce que le Bouddha n’est pas une image pour nous ce n’est pas plus une notion. C’est quelque chose de plus substantiel que l’on peut toucher Ă  chaque moment et si vous avez ce genre de foi vous ĂȘtes rĂ©confortĂ©, personne ne peut vous enlever cela et au moment de mourir vous serez fort parce que vous savez qu’il n’y a ni mort ni naissance mais seulement des manifestations et des cessations de manifestation.

Au mois d’avril on ne peut voir aucun tournesol autour du Village des Pruniers et on pourrait dire qu’ils ne sont pas lĂ . Pourtant les graines de tournesol ont dĂ©jĂ  Ă©tĂ© plantĂ©es, les fermiers ont tout prĂ©parĂ© et ils sont conscients de cela. Lorsqu’ils regardent les collines et les champs vides ils peuvent dĂ©jĂ  voir les champs couverts de fleurs. Il se peut que nous ayons l’impression que les tournesols n’existent pas Ă  ce moment lĂ , mais cette notion ne correspond pas Ă  la rĂ©alitĂ©. Les tournesols sont lĂ  mais il manque quelques conditions comme la chaleur des mois de juillet et d’aoĂ»t. C’est la raison pour laquelle nous ne voyons pas de tournesol. Alors qu’il marchait seul, Saint François d’Assise s’est approchĂ© d’un amandier, il a regardĂ© profondĂ©ment cet arbre et lui a demandĂ© : "Parle moi de Dieu". Et tout d’un coup l’amandier s’est couvert de fleurs. Lorsque j’ai lu cette histoire, j’ai eu l’impression de lire une histoire zen, parce que les histoires zen ressemblent Ă  cette histoire.

Si au mois d’Avril, en marchant, vous passez prĂšs d’un champs de tournesols, demandez aux collines de vous montrer le Royaume des Cieux, la Terre Pure. Il se peut que le champ se couvre tout d’un coup de tournesols. En fait les fermiers qui ont plantĂ© les semences savent qu’elles sont lĂ  et ils sont capables de voir les fleurs. Il suffit d’ĂȘtre ici en juillet pour voir tout le champ couvert de tournesols.

Dans le bouddhisme nous parlons en termes de dimension historique et de dimension ultime. Dans la premiĂšre nous voyons plusieurs signes comme la naissance, la mort, l’ĂȘtre, le non-ĂȘtre, l’aller, le venir.

Dans la dimension historique vous pouvez penser que le Bouddha vivait il y a 2600 ans et qu’il vous faudra peut ĂȘtre attendre de trĂšs nombreuses annĂ©es avant qu’un autre Bouddha apparaisse. Il se peut que vous planifiez votre vie d’aprĂšs cette opinion, mais si vous choisissez la dimension ultime vous verrez que vous pouvez tenir la main du Bouddha pour partir en mĂ©ditation marchĂ©e immĂ©diatement.

Les deux dimensions sont une. Vous ne pouvez pas imaginer la dimension ultime distincte de la dimension historique. C’est comme les vagues et l’eau. Les vagues vues Ă  la surface de l’ocĂ©an reprĂ©sentent la dimension historique mais la substance qui crĂ©e la vague, c’est l’eau et bien que les vagues semblent avoir un dĂ©but, une fin, un haut et un bas, l’eau dans les vagues ne peut pas ĂȘtre dĂ©crite par ces caractĂ©ristiques.

La dimension ultime ne dĂ©pend pas des signes, des notions d’existence, de non-existence, de l’aller et du venir. Nous savons que l’eau et les vagues sont unes et nous ne pouvons pas sĂ©parer l’une de l’autre. La dimension historique est une avec la dimension ultime. Si vous savez toucher les vagues profondĂ©ment, vous pouvez toucher l’eau. Si vous savez toucher profondĂ©ment le monde de la naissance et de la mort, de l’aller et du venir, vous pouvez toucher le monde de la non-naissance et de la non- mort, du non-aller et venir. C’est cela, notre pratique de chaque jour. II faut vivre votre vie de telle façon que vous puissiez toucher la dimension ultime plusieurs fois par jour, sinon tout le temps.

Supposez que vous regardiez ce pot de fleurs. Si vous ĂȘtes en Pleine Conscience, et il y a des façons d’ĂȘtre en Pleine conscience comme par exemple respirer, s’incliner profondĂ©ment devant la fleur. Tout d’un coup la fleur se rĂ©vĂšle Ă  vous : la fleur est une manifestation et nous mĂȘme sommes une manifestation. Les fleurs reprĂ©sentent tout le cosmos, l’infini, dans le temps et dans l’espace et nous aussi.

Si vous continuez Ă  ĂȘtre lĂ , Ă  observer alors vous pouvez toucher la dimension ultime de la fleur et vous touchez votre propre dimension ultime. A ce moment vous pouvez vous Ă©tablir dans la dimension ultime, libĂ©rĂ© des notions de naissance et de mort, d’aller et de venir, d’ĂȘtre et de non ĂȘtre.

Vous ne voyez pas seulement la prĂ©sence de la fleur comme une chose merveilleuse mais aussi la manifestation de vous-mĂȘme comme une chose merveilleuse. Selon votre regard profond vous toucherez plus ou moins profondĂ©ment la dimension ultime de la fleur et de vous-mĂȘme. Le Bouddha nous offre le genre de pratique qui peut nous aider Ă  toucher la dimension ultime.

L’autre jour je parlais de la pratique de toucher la terre. Chaque soir avant ou aprĂšs la mĂ©ditation assise nous faisons trois, cinq ou six prosternations. En joignant les paumes de mains, en vous inclinant vous vous voyez en contact avec tous les ancĂȘtres. AncĂȘtres spirituels et ancĂȘtres de la famille, vous vous voyez comme la continuation de ces ancĂȘtres, vous voyez qu’ils sont vous-mĂȘme et vous voyez aussi vos enfants et petits enfants et disciples prĂ©sents dans ce moment. Dans l’acte de toucher la terre, vous vous rendez Ă  la terre pour ĂȘtre avec le courant d’ĂȘtre que vous ĂȘtes vraiment. A ce moment vous ĂȘtes vos ancĂȘtres mais aussi les gĂ©nĂ©rations futures. Simplement en touchant la terre de cette façon vous touchez la dimension ultime. Restant ainsi pendant quelques minutes :inspirez, expirez et vous vous voyez comme Ă©tant chaque personne de la lignĂ©e. A ce moment lĂ  vous n’ĂȘtes plus pris par la notion de moi tel que :" Je suis ce corps ". Le Bouddha a dit :

" Ces yeux ne sont pas moi, je suis plus que ces yeux ". Touchant la terre pour la seconde fois il se peut que vous soyez tout d’un coup un avec la terre, avec les montagnes, avec les pins. Touchant la terre, vous ĂȘtes tout : la fleur, la table. Vous ĂȘtes libres des notions de moi. A ce moment vous touchez la dimension ultime.

Il se peut que vous fassiez cela par respect pour le Bouddha et les ancĂȘtres. Vous restez vous-mĂȘme et les ancĂȘtres restent eux-mĂȘmes. Une personne distincte s’incline pour montrer sa gratitude envers les ancĂȘtres. Cette pratique est utile mais en continuant vous allez approfondir et en vous inclinant vous toucherez la dimension ultime.

Si nous pouvons toucher la dimension ultime une transformation se passe en nous. La peur, la douleur commencent Ă  se transformer. La joie, la libertĂ©, la paix vont se dĂ©velopper en nous, nous nous sentons bien en nous-mĂȘmes. Nous sentons que l’amour et la comprĂ©hension nous habitent et les gens, les arbres, l’eau et l’air autour de nous vont sentir la mĂȘme chose.

Calme

Publié dans #Inspiration

Calme

Sur le chemin menant Ă  la lune

je me retourne.

Je t'aperçois

et ne cesse de m'Ă©merveiller

sur ta somptueuse beauté,

bulle d'eau

qui flotte sur l'océan de l'espace immense.

Tu es la Terre,

tu es la planĂšte verte

Ă©clatante et superbe,

pourtant si fragile.

Je me découvre en toi,

moi qui marche dans la pleine conscience

sur le chemin de terre

bordé d'herbe fraßche.

Mes pieds font une promesse Ă  la Terre.

Mes yeux embrassent l'heure matinale.

Je m'installe dans la paix de l'instant présent.


Les feuilles d'automne tombent

et recouvrent le chemin

déroulant le tapis de la marche méditative.

HĂ©sitant, l'Ă©cureuil se cache

derriĂšre le tronc de l'arbre,

il me considĂšre

de ses yeux teintés d'un peu de surprise,

puis se lance Ă  la cime de l'arbre

pour disparaĂźtre derriĂšre une touffe de feuilles.

Je vois le ruisseau limpide

se glisser entre les fentes des rochers blancs.

L'eau rit aux Ă©clats,

les pins sifflent,

ensemble ils célÚbrent une matinée de paix.

Je vois aussi les lieux de souffrance

oĂč les conflits entravent l'homme.

Nous nous faisons souffrir les uns les autres

et déversons sur la Terre

la vague déferlante de la discrimination

de la haine,

de l'avidité,

causes implacables

de tant de catastrophes.

Les poussins de la mĂȘme poule

se teintent de couleurs différentes et se battent.

Les cris déchirants clament l'horreur de la guerre.

La Terre, c'est nous.

Chers frùres, chùres sƓurs,

elle est si belle que j'ai envie de prendre dans les bras toute la planĂšte,

de la serrer tendrement contre ma poitrine.

Respirons ensemble au mĂȘme rythme

et ramenons le calme dans notre esprit.

Nous, les ĂȘtres humains, coopĂ©rons.

Acceptons-nous.

Aimons-nous

car nous aimons la Terre,

et nous savons

que notre amour est le tout,

notre amour n'est pas un fragment.

Tous ensemble, nous sommes responsables de la planĂšte.


Mes chers frùres et sƓurs,

ce matin, transmettons-nous la Vue.

Faisons en sorte

que prenne forme le grand amour.

-Thich Nhat Hanh

Calme

Un caillou dans votre poche - Méditation guidée

Publié dans #Inspiration

La trÚs belle méditation guidée des cailloux, offerte par un des nos frÚres. Elle est en anglais, vous pouvez lire la traduction française ci-dessous.

MĂ©ditation des cailloux

J’inspire

Le premier caillou me rappelle d’ĂȘtre frais comme une fleur. Je sais que je suis un ĂȘtre humain et les ĂȘtres humains sont aussi des fleurs, les fleurs de cette planĂšte. Nous oublions parfois que nous sommes des fleurs et nous nous dessĂ©chons. A cause de cela je veux me souvenir que je suis une fleur. Ce caillou va reprĂ©senter la fraicheur de la fleur.

J’inspire je me sens frais

J’expire je suis une fleur

Le deuxiĂšme caillou me rappelle la soliditĂ© et la stabilitĂ© que je peux offrir Ă  mes frĂšres et mes sƓurs et ma communautĂ©. Nous savons que chacun d’entre nous, avons la capacitĂ© d’ĂȘtre solide et ferme comme une montagne, solide dans notre esprit, nos Ă©motions, nos sentiments et dans notre amour. Je veux me souvenir d'ĂȘtre une fondation solide pour mes frĂšres, mes sƓurs, mes bien-aimĂ©s et ma communautĂ©.

J’inspire je me sens solide

J’expire je suis une montagne

Le troisiĂšme caillou reprĂ©sente l’eau, la tranquillitĂ©. Je sais que mon esprit peut reflĂ©ter toutes mes pensĂ©es, mes actions, mes anxiĂ©tĂ©s et lorsque mon esprit est calme, tranquille il va reflĂ©ter tout ce qui se passe rĂ©ellement, ce qui se passe Ă  l’intĂ©rieur de moi et autour de moi. Comme un lac complĂštement immobile qui reflĂšte exactement ce qui est autour de lui comme les montagnes, les arbres, les nuages et mĂȘme le ciel bleu clair. Je souhaite pratiquer comme un lac.

J’inspire eau, tranquillitĂ©

J’expire reflĂ©ter

Le quatriĂšme caillou reprĂ©sente l’espace. L’espace qui est en moi et autour de moi. L’espace que je peux m’offrir Ă  moi-mĂȘme, Ă  mes amis et Ă  ma famille, tous ceux qui sont proche de moi. Je sais et je suis conscient que tout le monde a besoin d’espace en eux et autour d’eux ; donc je veux offrir Ă  moi-mĂȘme de l’espace et aussi Ă  mes amis, ma famille, mes bien-aimĂ©s cet espace dont ils ont besoin afin qu’ils puissent ĂȘtre libres.


J’inspire je ressens l’espace en moi et autour de moi

J’expire je suis libre

PoĂšmes de Thay

Publié dans #Inspiration

O toi qui tourne en rond,

S'il te plait arrĂȘte-toi.

Pourquoi le fais-tu?

"Je ne peux ĂȘtre sans aller, c'est pourquoi je tourne en rond."

O toi qui tourne en rond

s'il te plait arrĂȘte-toi.

"Mais si je cesse d'aller, je cesserai d'ĂȘtre."

O mon ami qui tourne en rond,

Tu n'es pas un avec cette histoire folle de tourner en rond.

Tu peux prendre plaisir Ă  aller,

Mais pas Ă  tourner en rond.

"OĂč puis-je aller?"

Va lĂ  oĂč tu peux trouver ton aimĂ©,

LĂ  oĂč tu peux te trouver toi-mĂȘme.

Vous cherchez quelque chose?

Publié dans #Inspiration

Thay :

Ce matin j’ai marchĂ© comme d’habitude et pendant la marche je me dis :

« Qu’est ce que tu cherches ? ».

Pendant l’inspiration : « Qu’est–ce que tu cherches ? Qu’est-ce que tu cherches ? ».

Puis Thay regarde l’audience et demande :
« Vous cherchez quelque chose ? » et ce que vous cherchez est déjà là.

C’est cela, c’est  cela, c’est cela et quand vous faütes une inspiration

vous réalisez que ce que vous cherchez est déjà là en vous et autour de vous,

les merveilles de la vie. Est-ce que vous cherchez le Royaume de Dieu ?

Il est lĂ , il est disponible mais vous n’ĂȘtes pas en contact avec le Royaume.

Il faut se mettre en contact, la nature du Bouddha, le Nirvana,

les merveilles de la vie, la Terre MĂšre, le PĂšre Soleil, tout est lĂ  pour vous

et vous n’ĂȘtes pas lĂ  pour eux.

Donc l’éveil, la concentration, le bonheur est possible Ă  chaque pas, Ă  chaque souffle.

Au Village des Pruniers vous ĂȘtes encouragĂ© Ă  ĂȘtre heureux Ă  chaque pas, avec chaque souffle.

C’est une chose possible, le bonheur c’est possible, la paix c’est possible,

la fraternitĂ© c’est possible.

Il faut commencer Ă  vivre.

 

dans-le-desert.jpg



A la Rechercher L’un de l’Autre :

Honoré du Monde, je vous ai cherché depuis mon enfance.

Dùs mon premier souffle, j’ai entendu votre appel.

Je suis parti Ă  votre recherche, Bhagavan,

J’ai parcouru tant de chemins pĂ©rilleux, rencontrĂ© tant de dangers.
Dans mes pĂ©rĂ©grinations, j’ai endurĂ© dĂ©sespoir, peur, espoir et souvenirs.
Vers les contrées les plus lointaines, sauvages et immenses, je suis parti,

Sur les Ă©tendues d’étranges ocĂ©ans, j’ai naviguĂ©,

Sur les plus hauts sommets perdus dans les nuages, j’ai grimpĂ©.marche dans le desert
j’ai plusieurs fois gĂźt mort dans une solitude absolue sur le sable d’anciens dĂ©serts,

J’ai tentĂ© de retenir dans mon cƓur les nombreuses larmes de pierre,

J’ai rĂȘvĂ© de boire les gouttes de rosĂ©e scintillant de l’éclat des galaxies lointaines.
J’ai  laissĂ© des traces de pas sur les montagnes cĂ©lestes des dieux.
J’ai hurlĂ© du fond de l’enfer Avichi, extĂ©nuĂ©, Ă©perdu de dĂ©sespoir.
C’est parce que j’avais faim, j’avais soif.
Au cours de mes dizaines de millions de vies,

J’ai dĂ©sirĂ© dĂ©couvrir l’image de Celui qui est parfait,

Bien que je n’en connaisse pas exactement le lieu,

O BĂ©ni, je sens du fond de mon cƓur la mystĂ©rieuse certitude de votre prĂ©sence.
J’ai le sentiment que depuis des milliers de vies, vous et moi, n’avons Ă©tĂ© qu’un,

Qu’entre nous il n’y a que l’éclair d’une pensĂ©e.
Hier encore, je marchais seul, j’ai vu le chemin ancien couvert de feuilles d’automne.
La lune brillante, accrochĂ©e au-dessus du portail, est apparue soudain comme l’image d’un vieil ami.
Alors les étoiles tout excitées ont annoncé que vous étiez là.
La nuit durant, la pluie de la compassion n’a cessĂ© de tomber,

La lumiĂšre des Ă©clairs traversait ma fenĂȘtre, un Ă©norme orage s’était levĂ©,

Comme si la Terre et le Ciel s’emportaient dans leur furie.
Enfin, en moi, la pluie s’est arrĂȘtĂ©e et les nuages ont disparu.
Par la fenĂȘtre, je vis la lune tardive, paisible et brillante.
Le Ciel et la Terre étaient totalement apaisés.
En me contemplant dans le miroir de la lune, je me suis vu et soudain je vous ai vu, Bhagavan.
Vous Ă©tiez souriant.

Comme c’est Ă©trange !

La lune brillante de la liberté  venait juste de me revenir.
En un seul instant, tout ce à quoi j’ai cru, je l’avais perdu.
DĂšs lors, et Ă  chaque instant qui suivit, je vis que rien ne m’avait quittĂ©,

Et qu’il n’y avait rien à retrouver.
Chaque fleur, chaque caillou et chaque feuille me regarde et me reconnaĂźt.chemin-de-pierre.jpg
OĂč que se tourne mon regard, je vous vois sourire,

Le sourire de ce qui ne naĂźt ni ne meurt.
VoilĂ  ce que j’ai dĂ©couvert en regardant dans le miroir de la lune.
Je vous ai vu, Bhagavan,

Vous ĂȘtes assis lĂ , aussi solide que le Mont MĂ©rou, aussi calme que mon propre souffle.
Vous ĂȘtes assis comme s’il n’y avait jamais eu la violence des tempĂȘtes en ce monde.
Vous ĂȘtes assis en paix et libre.
Je vous ai  trouvé Bhagavan, et je me suis trouvé.
Je suis assis, le ciel bleu profond est silencieux,

Les montagnes couvertes de neige sont peintes sur l’horizon, et le soleil chante sa joie.


Vous ĂȘtes mon premier amour, Bhagavan,

Vous ĂȘtes l’amour toujours prĂ©sent, immaculĂ© et vierge,

Ainsi  jamais je n’aurai besoin d’un amour dont on dirait qu’il est « le dernier ».
Vous ĂȘtes la source, le courant d’une vie spirituelle,

Qui s’écoule depuis des millions de vies dans le samsara, mais qui reste pure comme au dĂ©but.


Vous ĂȘtes ma paix.
Vous ĂȘtes ma soliditĂ©.
Vous ĂȘtes ma libertĂ© intĂ©rieure,

Vous ĂȘtes le Bouddha,
Vous ĂȘtes le Tathagata.
Sans dévier,

Je souhaite  nourrir en moi la solidité et la liberté,

Pour les offrir Ă  tous les ĂȘtres.
Aujourd’hui et toujours.


-          PoÚme Inédit de Thich Nhat Hanh

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